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Messier 42

Nébuleuse Diffuse M42 (NGC 1976), une nébuleuse en émission et réflexion dans Orion

Nébuleuse d'Orion

[m42.jpg]
Ascension Droite 05 : 35,4 (h:m)
Déclinaison -05 : 27 (deg:m)
Distance 1,6 (kilo.al)
Magnitude 4,0 (visuelle)
Dimension apparente 85x60 (min. d'arc)

Pourrait avoir été découverte en 1610 par Nicolas-Claude Fabri de Peiresc.
Trouvée indépendamment par Jean-Baptiste Cysat en 1611.

La nébuleuse d'Orion M42 est la plus brillante nébuleuse diffuse dans le ciel, visible à l'œil nu dans des conditions d'observation moyennement bonnes, et gratifiante dans tous les instruments, des plus petites jumelles aux plus grands observatoires terrestres ou encore au Télescope Spatial Hubble. C'est aussi un gros objet dans le ciel : avec un diamètre supérieur à 1 degré elle couvre une surface plus de quatre fois celle de la Pleine Lune.

Etant si bien visible à l'œil nu, on peut s'étonner que sa nature nébuleuse n'ait apparemment pas été décrite avant l'invention de la lunette. Cependant, les plus brillantes étoiles situées à l'intérieur furent remarquées et cataloguées comme une étoile de cinquième magnitude : en l'an 130 environ de notre ère, Ptolemée l'inclut dans son catalogue, comme le fit Tycho Brahe à la fin du 16ème siècle, puis Johann Bayer en 1603 - ce dernier la notant comme Theta Orionis dans son Uranometria. En 1610, Galilée détecta beaucoup de faibles étoiles quand il regarda cette région pour la première fois avec sa lunette, mais il ne fit pas mention de la nébuleuse. Quelques années plus tard, le 4 février 1617, Galilée examina plus attentivement l'étoile principale, Théta1, et découvrit qu'elle était triple avec un grossissement de 27 ou 28 fois, sans toujours percevoir la nébuleuse.

La Nébuleuse d'Orion a probablement été découverte à la fin de 1610 lorsque Nicolas-Claude Fabri de Peiresc(1580-1637), un homme de loi français, tourna sa lunette vers cette région du ciel et fit état d'un nuage nébuleux. Elle fut trouvée indépendamment en 1611 par le Jésuite astronome Jean Baptiste Cysat (1588-1657) de Lucerne qui la compara à la comète observée par lui en 1618. Le premier dessin connu de la Nébuleuse d'Orion a été réalisé par Giovanni Batista Hodierna et contient trois étoiles ; ce sont probablement Théta1, Théta2A et Théta2B. Mais toutes ces découvertes semblent avoir été ignorées pendant quelque temps, de sorte que finalement Christian Huygens a été longtemps crédité de sa redécouverte indépendante en 1656, notamment par Edmond Halley qui l'inclut dans sa liste de six "nébuleuses" (Halley 1716), et par Charles Messier quand il l'ajouta à son catalogue le 4 mars1769.

Il est quelque peu insolite que la nébuleuse d'Orion ait trouvé sa place dans le catalogue de Messier, ainsi d'ailleurs que le brillant amas d'étoiles Praesepe M44 ou encore les Pléiades M45 ; normalement Charles Messier n'incluait que les objets faibles pouvant être facilement confondus avec des comètes. Mais, en cette nuit du 4 mars 1769, il détermina la position de ces objets bien connus, et, selon Owen Gingerich, "les ajoutant à l'évidence comme 'des friandises' afin de porter la liste à 45 objets" à l'occasion de sa première publication dans les Mémoires de l'Académie de 1771 (publiée en 1774). On peut se demander pourquoi il préféra une liste de 45 entrées plutôt que de 41 ; une raison possible serait qu'il voulait surpasser le catalogue Lacaille de 1755 des objets de l'hémisphère Sud, qui contenait 42 entrées. Ainsi Messier détermina la position de la petite partie au Nord-Est de la nébuleuse, déjà signalée par Jean-Jacques d'Ortous de Mairan en 1731 comme étant une nébuleuse séparée, et qui depuis porte donc le numéro M43.

Comme les dessins de M42 connus de lui représentaient si peu l'impression qu'en avait Messier qu'il réalisa lui-même un "bon dessin" de cet objet, afin "d'aider à la reconnaître par la suite, pourvu qu'elle ne soit pas sujette à des changements avec le temps" (comme il le note dans l'introduction à son catalogue).

Depuis lors cet objet magnifique a toujours fasciné les astronomes. Ce fut la première observation du ciel profond de William Herschel en 1774 avec un télescope, construit de sa main, de 6 pieds de distance focale (183 cm). En 1789, observant avec son télescope de 48 pouces (1,22 m) d'ouverture et de 40 pieds (12,20 m) de distance focale, il décrivit la nébuleuse en termes quelque peu prophétiques, comme "une informe nuée ardente, les éléments chaotiques de futurs soleils".

La nature gazeuse de la Nébuleuse d'Orion a été révélée en 1865 à l'aide de la spectroscopie par William Huggins. En septembre 1880, M42 fut la première nébuleuse à être photographiée avec succès par Henry Draper.

La Nébuleuse d'Orion est située à environ 1 600 (ou peut-être 1 500) années-lumière. A cette distance, son diamètre angulaire de 66x60 minutes d'arc correspond en linéaire à environ 30 années-lumière. Dans sa partie Nord, la nébuleuse est traversée par une remarquable traînée sombre, bien visible sur notre photographie, obtenue par David Malin du Anglo-Australian Observatory. De plus amples informations sur cette image sont également disponibles .

La partie Nord-Est est la nébuleuse M43 signalée en premier par De Mairan puis cataloguée en tant que nébuleuse séparée par Charles Messier. Comme M42, il s'agit d'une nébuleuse en émission, brillant de la lumière émise par ses atomes, excités par les radiations de haute énergie provenant des jeunes étoiles massives et très chaudes, situées à l'intérieur du nuage de gaz. Dans le voisinage proche, vers le Nord, il y a aussi de plus faibles nébuleuses, réfléchissant partiellement la lumière de la grande. Elles n'étaient pas perceptibles pour Charles Messier mais furent cataloguées par la suite sous les numéros NGC1973, 1975 et 1977. A noter que NGC1977 a été trouvée par William Herschel (son H V.30), tandis que NGC1973 et NGC1975 sont des découvertes de Heinrich Ludwig d'Arrest. Nous disposons ici d'une collection d'images de M42, M43, et d'autres encore de M42, M43 et NGC 1973-5-7.

La Nébuleuse d'Orion est la partie la plus brillante et la plus remarquable d'un nuage de gaz et de poussière beaucoup plus large s'étendant sur plus de 10 degrés, bien au-delà de la moitié de la constellation d'Orion. L'extension linéaire de ce nuage géant est bien de plusieurs centaines d'années-lumière. Il peut être visualisé sur des clichés à longue pose (de Burnham, par exemple) et contient, en plus de la Nébuleuse d'Orion proche de son centre, les objets suivants, souvent fameux par eux-mêmes : la Boucle de Barnard, la nébuleuse Tête de Cheval et sa région (contenant aussi NGC2024 = Orion B), et les nébuleuses en réflexion autour de M78. Déjà impressionnante en photographie de haute définition prise en lumière visible, la Nébuleuse d'Orion est absolument splendide en infrarouge.

M42 elle-même est apparemment un nuage très tourmenté de gaz et de poussière, plein de détails intéressants, que Charles Robert O'Dell, dans la légende de sa photo prise avec le HST, compare à la riche topographie du Grand Canyon. Selon leur inspiration, différents observateurs ont donné des noms aux principaux traits marquants : la nébuleuse formant la bande sombre séparant M43 de la nébuleuse principale s'étend bien à l'intérieur de cette dernière, esquissant une forme généralement surnommée "la gueule du poisson". Les régions brillantes de chaque côté sont "les ailes", tandis qu'à la base de "la gueule du poisson" se trouve un amas de jeunes étoiles, appelé "l'Amas du Trapèze". L'extension de l'aile au Sud et à l'Est (en bas et à gauche sur notre image) est appelée "l'Epée", la nébulosité brillante sous le Trapèze "l'Estocade" et l'extension plus faible à l'Ouest (sur la droite) "la Voile". On trouvera ici une collection limitée d'images de détails de M42, comprenant d'autres descriptions de la région la plus brillante de la nébuleuse par de célèbres observateurs visuels, ainsi qu'une étude du Trapèze et de sa région illustrée par des images du "Lowell Observatory".

L'Amas du Trapèze est parmi les plus jeunes amas ouverts connus, avec de nouvelles étoiles toujours en formation dans cette région. Comme indiqué plus haut il fut d'abord représenté comme étoile triple le 4 février 1617 par Galilée, qui n'était pas au courant de la nébuleuse. Cette découverte ne fut pas tellement connue, de sorte que Christian Huygens redécouvrit indépendamment l'étoile triple en 1656, en même temps que la Nébuleuse d'Orion. Ces trois premières étoiles sont souvent désignées par les lettres "A", "C" et "D". Il peut être intéressant de remarquer que, dans les deux cas, le Trapèze (Theta 1 Orionis) était seulement la seconde découverte d'une étoile multiple après celle de l'étoile double Mizar (Zeta Ursae Majoris). La quatrième, "B", fut trouvée en premier par l'Abbé Jean Picard en 1673 (selon de Mairan), puis, indépendamment, par Huygens en 1684. La découverte de la cinquième, "E", revint à Friedrich Georg Wilhelm Struve en 1826 à Dorpat, avec une lunette de 9,5 pouces (24 cm), celle de la sixième, "F", à John Herschel le 13 février 1830, celle de la septième, "G", à Alvan Clark in 1888, alors qu'il testait sa lunette de 36 pouces (91 cm) à l'Observatoire de Lick, et enfin la huitième, "H", fut trouvée avec la même lunette toujours en 1888 par E.E. Barnard. Ce dernier découvrit plus tard que "H" était double, avec deux composantes de 16ème magnitude. Aujourd'hui nous savons que les étoiles "A" et "B" sont toutes les deux des variables à éclipses de type Algol : "A" (aussi connue comme V1016 Ori) fut découverte en 1975 et varie entre les magnitudes 6,73 et 7,53 avec une période de 65,4325 jours, tandis que "B" (également cataloguée BM Ori) varie entre 7,95 et 8,52 en 6,4705 jours et est toujours la plus faible des 4 étoiles du Trapèze.

Les recherches sur la Nébuleuse d'Orion ces dernières décennies ont révélé que la partie visible, c'est à dire M42, cette bulle lumineuse de gaz chaud et ionisé entourant les étoiles du Trapèze, n'est que la fine enveloppe d'un nuage de matière, plus grand et plus dense, appelé le Nuage Moléculaire 1 d'Orion (OMC 1). Il se trouve que nous voyons cette structure presque de face. L'hypothèse d'un tel modèle a été avancée à l'origine par Münch (1958) et Wurm (1961), puis complètement élaborée par différents chercheurs dans les années 1973-1974 (Zuckerman (1973), Balick et.al. (1974)), bientôt étayée par des preuves, et est toujours étudiée en détail ; voir par exemple O'Dell (2001) pour un rapport récent avec les références citées dans ce document. Le San Diego Supercomputer Center (SDSC)'s VisLab a créé une représentation tridimensionnelle de la Nébuleuse d'Orion basée sur ce modèle ( voir l'image d'une vue de côté de M42).

La nébuleuse d'Orion a été en permanence un objectif privilégié pour le Télescope Spatial Hubble et ce depuis l'origine, même avant sa rectification optique. Une découverte majeure a été celle des disques protoplanétaires, également appelés "Proplyds" (systèmes planétaires en formation) dans ces clichés HST de M42 (images utilisées pour une animation simulant l'approche d'une proto-étoile [voir texte explicatif]). Les images du HST de novembre 1995 ont permis de pénétrer plus avant le processus compliqué qui se déroule dans cette "fabrique d'étoiles". Les investigations HST de janvier 1997 ont révélé d'intéressantes interactions entre les jeunes étoiles chaudes du Trapèze et les disques protoplanétaires : leur puissant rayonnement tend à détruire les disques, au point que les étoiles les moins massives, en cours de formation, peuvent perdre la matière nécessaire à la création de systèmes planétaires.

Une excellente synthèse des caractéristiques astrophysiques de la Nébuleuse d'Orion, sous la forme d'une superbe monographie, a été présentée en 2003 par Charles Robert O'Dell (O'Dell 2003), qui fait ainsi l'état des connaissances du moment, y compris les recherches avec le HST.

Il est très facile de trouver la Nébuleuse d'Orion puisqu'elle entoure l'étoile multiple (ou amas) Theta Orionis, visible à l'œil nu au milieu de l'épée d'Orion. D'ailleurs, dans de très bonnes conditions d'observation, la nébuleuse elle-même peut être aperçue à l'œil nu comme une faible nébulosité autour de cette étoile.

M42 est aussi l'un des objectifs les plus faciles et les plus satisfaisants, pour l'amateur astrophotographe.

  • Historique des Observations et Descriptions de M42
  • L'Amas du Trapèze - Images de l'Amas du Trapèze
  • Image Infrarouge de la région de l'Amas du Trapèze, et de l'ensemble de la Nébuleuse d'Orion M42/43, 2MASS
  • Images Amateurs de M42
  • Images de M42 par l'Observatoire Lowell
  • Images de M42 par le Télescope Anglo-Australien et le "UK Schmidt telescope" (David Malin)

  • Images de M42 par le HST :
  • Images de M42 par le "Chandra X-ray Observatory"
  • Autres images de M42 et M43
  • Images Amateurs de M42 et M43
  • Images UKS de M42, M43 et NGC 1973-5-7, par David Malin
  • Autres images de M42, M43 et NGC 1973-5-7;
  • Images Amateurs de M42, M43 et NGC 1973-5-7

  • Bill Arnett : Nébuleuse d'Orion M42/43 ; page photo ; page info.

  • Représentation 3D de la nébuleuse d'Orion (SDSC Vislab)
  • WEBDA : la page "Amas ouverts" sur l'Amas du Trapèze dans la Nébuleuse d'Orion, M42
  • La documentation SIMBAD sur M42
  • La documentation NED sur M42
  • Publications sur M42 (NASA ADS)
  • Rapports d'Observations sur M42 (IAAC Netastrocatalog)
  • La documentation NGC "en ligne" sur M42

    Références : (version originale



    Hartmut Frommert
    Christine Kronberg
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    Dernière Modification : 12 avril 2006

    Traduction française
    Bernard Trézéguet
    27/12/98 - 14/01/04 -
    09/12/06 -